Il est désormais acquis qu’à partir du 1er siècle de notre ère, l’Aquitaine n’a plus importé de vins en provenance de ses pays colonisateurs – l’Italie et la Grèce – mais est devenue exportatrice.
La vigne ‘vitis vinifera’ , végétal spontané existait là avant même l’apparition de l’homme : elle n’avait cessé d’être améliorée par boutures et greffes. Pour les marchands appelés ‘negociators’ le vin était devenu une monnaie d’échange contre des esclaves, dont le monde romain avait besoin pour sa main d’œuvre.
La paroisse Saint Pierre de Vertheuil soumise à la dualité de ses seigneurs et ‘Puycorneau’ fût la propriété de trois générations de notaires royaux et ce jusqu’à l’achat, en 1769, par Juste Claude Luetkens, descendant d’une très ancienne et influente famille de notables hambourgeois protestants, installée dans le négoce bordelais depuis 1680.
Le nom ‘Luetkens’ fut même donné à un cépage… La chartreuse de Picourneau fût construite en 1771 à l’emplacement de la précédente maison dont les fondations sont encore visibles de nos jours. Consécutivement à une dette de jeu et à une succession vacante, les 12 hectares du domaine de Picourneau furent vendus en 1824 aux criées du tribunal de Lesparre et acquis, pour 48.600 francs ; par Pierre Thomas MALVEZIN, notaire à Bordeaux, originaire d’Aurillac.
Ce nouveau propriétaire abandonna sa charge en 1834 pour se consacrer entièrement à la mise en valeur de son domaine. On lui doit, en plus de nombreuses querelles avec le maire de la commune et ses voisins, d’importantes acquisitions, la plantation de pins maritimes et de chênes lièges sur plusieurs parcelles.
A sa mort dans la maison en 1850, l’ensemble, qui comptait alors 78 hectares répartis sur trois communes fût transmis à l’un de ses fils Théophile MALVEZIN (1824-1897). Avocat, ancien avoué à la cour d’appel de Bordeaux, il consacra le plus clair de son temps à l’étude des questions agricoles et particulièrement à la viti-viniculture.
On lui doit également de nombreux ouvrages sur ces sujets, ainsi que des livres sur Montaigne, les Juifs et le commerce à Bordeaux, qui font aujourd’hui encore, autorité. Malheureusement, le vignoble de Picourneau, qu’il n’avait cessé d’améliorer, fût saisi, là encore, par décision de justice, et vendu en 1884. Ruiné par le phylloxera et autres maladies, sa superficie atteignait alors 135 hectares en “vignes, vergers, bois et bâtiments d’exploitation”.
Son fils, Frantz (1857-1923) avait alors 27 ans. Sorti major de l’Ecole Supérieure de Commerce de Bordeaux, il fonda une importante maison de vente de vin. Esprit inventif, il se tourna vers l’industrie. Il étudia expérimentalement et chimiquement la conservation du vin, rencontra Pasteur dans ses recherches sur la fièvre jaune, fonda une revue et publia de nombreux ouvrages, brochures et articles techniques.
Il inventa et fabriqua en son usine de Caudéran de nombreux instruments agricoles. Plusieurs générations de la famille MALVEZIN auront conduit le “Château Picourneau” à son apogée. Succès reconnu par les très nombreuses distinctions et récompenses obtenues dans divers concours en France et à l’étranger.
Par la suite, au fil des ans, le domaine appartint à une dizaine de propriétaires différents qui le négligèrent, le morcelèrent.
En 1967, Pierre et Line Canale, firent acquisition de la demeure et d’une partie des bâtiments, avec moins de deux hectares de parc et jardins. Ils réussirent à reconstituer l’ensemble des bâtiments, mais échouèrent à deux reprises dans leurs tentatives d’achat de parcelles de vignes contigües.
Ce n’est qu’en 2013 que leurs fils Jean Dominique Canale et sa femme Muriel parvinrent à acheter une pièce de vigne, petite partie intégrante de l’ancien “Domaine de Picourneau”. Ils entreprirent alors de reprendre la production de ce vin traditionnel en profitant de l’expérience ancienne. Dans ces conditions, ils ne pouvaient qu’ajouter au nom de Picourneau celui de Malvezin, ce qui a été fait et accepté par l’INPI.